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Laurent Binet
Braquage à l’italienne

Sous les atours virevoltants du roman épistolaire, Binet déploie une fresque luxuriante où le maniérisme italien flamboie.

Florence, 1557. Le rideau s’ouvre sur le corps du peintre Pontormo, retrouvé mort dans la chapelle où il oeuvrait depuis onze ans. Chargé d’investiguer par le duc de Florence, l’architecte Giorgio Vasari fait appel aux lumières du maître Michel-Ange. Or l’affaire ne s’arrête pas là : on retrouve chez le défunt un tableau licencieux où Vénus s’incarne sous les traits de mademoiselle Maria de Médicis, fille du duc. Le parfum de scandale se répand comme une traînée de poudre… Entrent en scène la reine de France Catherine de Médicis, ainsi que son cousin le maréchal Piero Strozzi, rival de Cosimo de Médicis. Le concert de messes basses et trahisons peut débuter…

On connaît le goût de Laurent Binet pour dynamiter le rapport entre Histoire et littérature. Ici, le Goncourt du premier roman (HHhH) s’enjaille du côté du roman épistolaire au temps de la dernière guerre d’Italie… Si on craint un temps d’être désarçonné par le côté casse-gueule de l’entreprise et sa vingtaine de protagonistes, le style virevoltant et l’humour grinçant ont tôt fait de rallier le lecteur. Lequel se prend au jeu pour tirer au clair les ombres de cette histoire. Dans le palais des glaces d’un whodunit où bouillonnent les passions, les génies s’écharpent au sujet de la censure religieuse, de la condition féminine et de l’histoire de l’art, tandis que les traîne-rapières échangent coups de sabre et cascades surgies du jeu video Assassins Creed. Sous les atours d’une partie de Cluedo, Binet déploie une fresque luxuriante où le maniérisme italien flamboie. « Le spectateur aussi doit mériter son tableau. »

PERSPECTIVE(S), LAURENT BINET, GRASSET, 304 PAGES. PHOTO © JULIEN DE ROSA