CLÉMENTINE MÉLOIS
ALORS C’EST BIEN
L’autrice rend hommage à son père sculpteur disparu. On ne connaissait ni l’homme ni son oeuvre, on referme le livre en ayant l’impression d’avoir perdu un ami.
Toute sa vie, le sculpteur Bernard Mélois meula de la tôle émaillée dans son atelier ouvert sur le jardin. Juste avant sa mort, il soudait encore à la nuit tombée dans sa caverne pleine à craquer. « – Comment tu voudrais te faire enterrer, Papa? – En bleu de travail. » Des bleus, ce livre d’adieu en est partout émaillé : les bleus à l’âme, les peurs une fois le cancer diagnostiqué, sur le cercueil que l’autrice repeint d’un outremer resplendissant.
Tandis qu’on lui prépare un « enterrement de pharaon » entouré de ses objets, Clémentine Mélois rend un dernier hommage à son « Pap », alchimiste du quotidien transformant les débris de la société marchande. Dans les années 60, ses sculptures bariolées se vendent mal, mais le salaire de professeur de Michèle, son adorée, les garde du superflu. Cela flatte son horreur des mondanités : « Je suis un bricoleur de l’inutile ». Les choses s’améliorent lorsque l’éditeur Pierre Seghers s’entiche de son travail.Se faufilant entre les mystères entourant la mort d’un proche, avec un tact épatant, l’Oulipienne brosse le portrait d’un anarchiste tendre, à l’humour insubmersible, aussi emporté dans ses détestations que dans son goût pour Paul Valéry : « Que vous êtes heureux, il ne vous manque que le sentiment de l’être ». Alors c’est bien? Impeccable!